Dans ce cours nous parlons de la faute du veau d'or et de la priere de Moshe apres cette faute. Il est question du role des sacrifices dans le judaïsme. Nous parlons aussi de la prière du prophète Elie qui semble prier pour que les juifs soient punis de leur fautes. Cette priere est difficile a comprendre surtout si on la compare a celle de Moshe dans la parasha.
La faute du veau d’or et la prière de Moshé
Dans la parasha de la semaine on trouve le récit de la faute du veau d’or et de la prière de Moshé qui la suit.
1- Pourquoi moise doit il prier deux fois après la faute de veau d’or
Or ce passage pose plusieurs problèmes.
Les versets disent : « Le peuple, voyant que Moïse tardait à descendre de la montagne, s'attroupa autour d'Aaron et lui dit: "Allons! Fais-nous un dieu qui marche à notre tête, puisque celui-ci, Moïse, l'homme qui nous a fait sortir du pays d'Égypte, nous ne savons ce qu'il est devenu." 2 Aaron leur répondit: "Détachez les pendants d'or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles et me les apportez." 3 Tous se dépouillèrent des pendants d'or qui étaient à leurs oreilles et les apportèrent à Aaron. 4 Ayant reçu cet or de leurs mains, il le jeta en moule et en fit un veau de métal; et ils dirent: "Voilà tes dieux, ô Israël, qui t'ont fait sortir du pays d'Égypte!" 5 Ce que voyant, Aaron érigea devant lui un autel et il proclama: "A demain une solennité pour l'Éternel!" 6 Ils s'empressèrent, dès le lendemain, d'offrir des holocaustes, d'amener des victimes rémunératoires; le peuple se mit à manger et à boire, puis se livra à des réjouissances. 7 Alors l'Éternel dit à Moïse: "Va, descends! Car on a perverti ton peuple que tu as tiré du pays d'Égypte! 8 De bonne heure infidèles à la voie que je leur avais prescrite, ils se sont fait un veau de métal et ils se sont courbés devant lui, ils lui ont sacrifié, ils ont dit: ‘Voilà tes dieux, Israël, qui t'ont fait sortir du pays d'Égypte!’" 9 L'Éternel dit à Moïse: "Je vois que ce peuple est un peuple rétif. 10 Donc, cesse de me solliciter, laisse s'allumer contre eux ma colère et que je les anéantisse, tandis que je ferai de toi un grand peuple!" 11 Mais Moïse implora l'Éternel son Dieu, en disant: “Pourquoi, Seigneur, ton courroux menace-t-il ton peuple, que tu as tiré du pays d'Égypte avec une si grande force et d'une main si puissante? 12 Faut-il que les Égyptiens disent: ‘C'est pour leur malheur qu'il les a emmenés, pour les faire périr dans les montagnes et les anéantir de dessus la face de la terre!’ Reviens de ton irritation et révoque la calamité qui menace ton peuple. 13 Souviens- toi d'Abraham, d'Isaac et d'Israël, tes serviteurs, à qui tu as juré par toi-même leur disant: Je ferai votre postérité aussi nombreuse que les étoiles du ciel; et tout ce pays que j'ai désigné, je le donnerai à votre postérité, qui le possédera pour jamais!" 14 L'Éternel révoqua le malheur qu'il avait voulu, infliger à son peuple. »
Lorsqu’on lit ce passage, on a l’impression que la faute du peuple est pardonnée par D.
Aussi incroyable que cela puisse paraitre la faute n’a pas l’air si grave que ca puisque Moshé commence sa prière en disant : « :"Pourquoi, Seigneur, ton courroux menace-t-il ton peuple ? » et D accepte la prière révoquant le malheur qu’il avait voulu infliger à son peuple.
Pourtant, lorsque Moshé descend de la montagne, il casse les tables de la loi et après avoir tué les 3000 personnes qui avaient adoré le veau d’or, il remonte vers D. A ce propos les versets disent « Puis le lendemain, Moïse dit au peuple: "Pour vous, vous avez commis un grand péché! Et maintenant, je vais monter vers le Seigneur, peut-être obtiendrai-je grâce pour votre péché." 31 Moïse retourna vers le Seigneur et dit: "Hélas! Ce peuple est coupable d'un grand péché, ils se sont fait un dieu d'or; 32 et pourtant, si tu voulais pardonner à leur faute!... Sinon efface-moi du livre que tu as écrit." 33 Le Seigneur répondit à Moïse: "Celui qui a prévariqué envers moi, c'est lui que j'effacerai de mon livre. 34 Et maintenant va, conduis ce peuple où je t'ai dit; mon envoyé te précédera. Mais le jour où j'aurai à sévir, je leur demanderai compte de ce péché." 35 Ainsi l'Éternel châtia le peuple, comme auteur du veau qu'avait fabriqué Aaron. »
Dans cette deuxième prière, la faute du veau d’or est devenue une faute énorme, elle n’est pas pardonnée par D.
Comment comprendre la cohérence de ce passage de la bible ? Si la faute a déjà été pardonnée alors pourquoi Moshé a-t-il besoin de faire une deuxième prière ? Et comment se fait il que la deuxième prière n’est pas exaucée alors que la première avait été acceptée et que D avait déjà pardonné ?
-Cette question a été soulevée par le rav Yehudah Léon Ashkenazi, (cours de 1985)
2- La réponse du rav ashkenazi et sa critique
Il répond a cette question en disant que la première prière avait pour but d’exonérer le peuple d’Israël, et qu’elle a été acceptée facilement, alors que la deuxième prière avait pour but d’obtenir le pardon du erev rav, « le grand mélange » de converti qui avaient suivi le peuple d’Israël. C’est ce « grand ramassis » qui avait causé la faute du reste du peuple, et c’est pour cette raison que Moshé doit prier une deuxième foi pour eux et leur pardon complet n’est pas obtenu.
Cette thèse ne me parait pas juste, par ce qu’elle ne rétablit pas totalement la cohérence du texte. En effet lorsque D dit : « Mais le jour où j'aurai à sévir, je leur demanderai compte de ce péché. » Il est évident que cette punition est adressée à tout le peuple d’Israël et pas uniquement la grande multitude, le talmud le cité par Rashi dit « toutes les fois que je me souviendrai de leurs fautes, je me souviendrai un peu de cette faute-ci en plus de leurs autres. Il n’est pas de punition qui frappe Israël qui ne contienne une part de punition pour le veau d’or (Sanhédrin 102a) ». On voit clairement que la réponse de D à la deuxième prière de Moshé est adressée à Israël et pas uniquement au « grand mélange ».
De plus, lorsque Moshé parle pour la première foi à D, on voit que le reproche de D est adressé d’abord a la grande multitude le verset dit «Alors l'Éternel dit à Moïse: "Va, descends! Car on a perverti ton peuple que tu as tiré du pays d'Égypte! » Et Rashi interprète en citant le talmud : « S’est corrompu ton peuple Il n’est pas écrit : « S’est corrompu le peuple », mais : « “ton” peuple ». Il s’agit du « ramassis » que tu as accueilli de ta propre initiative et que tu as converti sans me consulter, en disant : « Il est bon que des convertis s’attachent à la chekhina ! » Ce sont ces gens-là qui se sont corrompus et ont corrompu les autres ! ». Or si le réquisitoire de D accuse le « grand ramassis », il est logique de penser que le plaidoyer de Moshé dans la première prière a pour but de répondre à cette accusation et d’obtenir le pardon de ces accusés. Il serait illogique que D accuse les convertis et qu’en réponse Moshé se mette à prier pour le peuple d’Israël qui n’a même pas été incriminé.
De plus, Nahmanide (Chemoth 19 1-2) pense que « le grand ramassis » n’était pas présent au don de la torah et qu’ils n’ont jamais accepté les mitsvot, ni la religion juive. Dans cette optique on ne voit pas pourquoi D accuserait le grand ramassis d’avoir fait le veau d’or, puisque les non juifs ont le droit de représenter D avec des images, et que la torah leur permet d’adorer des statues, si les statues représentent le D unique. (Tosafoth sanhédrin 63b)
En suite, si on pense contre l’avis de Nahmanide, que le grand ramassis a assisté au don de la torah, il est vraisemblable de penser que tous les juifs étaient garants pour eux, suivant la règle disant « tous les juifs se sont portés garants les uns des autres au moment du don de la torah». (Ce qui inclut aussi les convertis, tosafoth haroch kidouchin 70b). Dans ce cas on ne peut pas penser que D va accorder le pardon à une partie du peuple et qu’il va exclure une autre partie de ce pardon.
D’autre part, lorsque le verset dit avant la première prière de Moshé «L'Éternel dit à Moïse: "Je vois que ce peuple est un peuple rétif (à la nuque dure). » Rashi commente « A la nuque dure : Ils opposent leur nuque dure à ceux qui les réprimandent et ils refusent d’écouter. » Selon le talmud, ce verset est descriptif des enfants d’Israël et pas du « grand ramassis », contrairement à ce qu’affirme le rav Ashkenazi. (Midrash Rabah Chemoth 42-9, Betsah 25b).
(Si je me suis attardé à critiquer la réponse du rav Ashkenazi c’est par respect pour lui et pour sa réponse, qui contient surement une part de vérité, si je pensais qu’elle ne valait pas le coup d’être rapportée j’aurais simplement dit que sa réponse n’est pas compréhensible)
3- Pourquoi D pardonne la faute sans que le peuple se repente et comment Moshé peut-il prendre sur lui la responsabilité de la faute.
Avant de proposer ma propre réponse je dois demander deux autres questions sur ce passage de la torah.
La première, on ne voit qu’à aucun moment les juifs font réellement techouvah de la faute du veau d’or. Les juifs ne sont pas exterminés uniquement parce que Moshé fait la prière pour eux. Les versets des psaumes sont explicites à ce sujet « Ils troquèrent ainsi leur gloire contre l’effigie d’un bœuf qui broute l’herbe. 21 Ils avaient oublié Dieu, leur sauveur, qui avait accompli de si grandes choses en Égypte, 22 des merveilles dans le pays de Cham, de formidables prodiges près de la mer des Joncs. 23 Il parlait de les anéantir, si Moïse, son élu, ne se fût placé sur la brèche devant lui, pour détourner sa colère prête à tout détruire. »
Il est difficile de comprendre comment la prière de Moshé a pu sauver les juifs alors qu’ils étaient coupables ? Dans sa prière Moshé dit à D « Si tu voulais pardonner à leur faute!... Sinon efface-moi du livre que tu as écrit. » Comme si Moshé voulait prendre sur lui la responsabilité de la faute des juifs, dans le judaïsme une telle requête parait impensable car la justice divine demande que chaque personne assume ses fautes, si le peuple se repend il peut être pardonné, mais si il ne se repend pas Moshé ne peut pas expier sa faute à sa place. Comment faut-il comprendre la prière de Moshé ?
4- L’expérience religieuse du monothéisme ne peut être vécue collectivement qu’à travers un media
La réponse à ces questions est la suivante.
Lorsque l’on regarde le texte il apparait que le veau d’or n’avait pas pour vocation de remplacer D, il devait simplement remplacer moise. Moise avait disparu, il fallait le remplacer par un autre intermédiaire.
Lorsque D a donné la torah il l’a donnée par un intermédiaire, Moshé lui même était contre cette idée, il voulait que tous les juifs aient un rapport directe avec D. Moshé accepte d’être un intermédiaire forcé par la demande du peuple et le commandement divin.
Dans le deutéronome les versets disent : « Va toi-même et écoute tout ce que dira l'Éternel, notre Dieu; et c'est toi qui nous rapporteras tout ce que l'Éternel, notre Dieu, t'aura dit, et nous l'entendrons, et nous obéirons." 24 L'Éternel entendit les paroles que vous m'adressiez, et il me dit: "J'ai ouï la voix de ce peuple, les paroles qu'il t'adresse: tout ce qu'ils ont dit est bien dit. 25 Ah! S'ils pouvaient conserver en tout temps cette disposition à me craindre et à garder tous mes commandements! Alors ils seraient heureux, et leurs enfants aussi, à jamais! »
Mais pourquoi D veut il que la torah soit donnée par un intermédiaire ? Quel est le rôle de Moshé dans le don de la torah ?
La torah interdit aux juifs de représenter D par une image. Cet interdit en implique un autre beaucoup plus dure à respecter, celui de ne pas s’identifier soi même à une image.
En effet, le verset dit « Comme dans l'eau, le visage répond au visage, ainsi chez les hommes les cœurs se répondent. » Michlei 27. Et le talmud explique que ce verset parle du rapport à D (Yevamoth 117a). Si un homme s’identifie à une image, automatiquement, il va aussi identifier D à une image.
Or, tout engagement moral présuppose l’identification à une image. Lorsqu’un homme s’engage à respecter le chabat ou a aller a la synagogue tous les jours, il s’identifie à l’image d’un groupe social donné, qui respecte le chabat ou qui va à la synagogue.
Lorsque les juifs ont reçu la torah ils s’engageaient à s’identifier à une certaine image à leurs propres yeux et aux yeux des nations. Dans le fait de recevoir la torah, il y avait d’une manière intrinsèque une sorte d’idolâtrie, car pour accepter un engagement moral dans le long terme, il faut accepter de s’identifier à une image idéalisée de soi. Cette image idéalisée fige D aussi. Le dieu des juifs haredi est une image figée, comme celui des mizrohnic, ou celui des massortim ou celui des libéraux. Tout engagement moral est l’identification à une image de soi, et toute identification de soi à une image, entraine l’identification de D à une image figée définie, donc tout engagement moral est une idolâtrie.
Lorsqu’un homme s’engage dans un groupe, s’il décide d’être un juif religieux Mizrahi, ou un orthodoxe au chapeau noir, il fige son rapport au divin. Mais si il refuse d s’identifier socialement, il ne peut pas vraiment être sure de son engagement. Celui qui ne s’identifie pas à un groupe ou à une image ne s’engage pas vraiment, il reste libre à chaque instant de renouveler ou de refuser son engagement moral. L’homme qui refuse l’identification social refuse l’engagement sinaïque disant « nous ferons et nous comprendrons », il veut rester libre de changer d’avis à chaque instant.
Lorsque les juifs devaient recevoir al torah, il fallait qu’ils s’enrôlent à vie dans « l’armée de D. » D’une certaine manière, il fallait qu’ils portent un uniforme. Or porter un uniforme c’est pratiquer l’idolâtrie.
Paradoxalement, l’acceptation de la torah sur le mont Sinaï implique d’une certaine manière une tendance à l’idolâtrie.
De plus lorsque l’on s’identifie à une image ou a un groupe, cette identification est toujours hystérique. Lorsqu’un homme s’identifie à un groupe, il le fait par ce qu’il veut oublier une autre image passée, peu flatteuse qu’il a de lui même.
L’homme qui fait techouvah s’identifie à une nouvelle image, par ce qu’il ne supporte plus l’image qu’il avait de lui même jusqu'à présent. Mais du fait que la nouvelle identité est une réaction à l’ancienne, l’individu est toujours en conflit entre les deux identités, celle qu’il cherche à abandonner et celle qu’il cherche à acquérir.
Celui qui fait techouvah sait qu’il est étranger à la nouvelle identité vers laquelle il se projette, car il sait que cette identification est idéalisée, a venir, et, de part ce fait, après sa techouvah, il se sent attiré par son identité passée qui après coup lui parait plus réel, bien que moins gratifiante.
Il en va de même pour le juif qui cherche à s’assimiler, pour lui l’identité idéale, c’est celle du non juif autochtone, mais il sait que cette identité est un idéal « à venir », et que pour le moment il est juif, et il sait que plus il cherche à s’assimiler plus il se sent juif.
Lorsque les enfants d’Israël ont reçu la torah, ils se sont engagés à tenir un rôle et à être une image pour les nations. Mais cette acceptation est violente, ils sentent qu’ils ne sont pas eux même dans ce rôle, c’est pour cela que, de manière réactive, ils cherchent à se retrouver eux même, et a revenir vers leurs racines égyptiennes en faisant le veau d’or.
Tout celui qui s’identifie à un groupe, garde au fond de lui un rapport conflictuel avec cette identification. Il veut devenir une partie de ce groupe, mais il sait qu’au fond il n’en fait pas partie.
Puisque le don de la torah est une identification collective, il implique de manière inéluctable, un rejet de la torah et la faute du veau d’or.
L’acceptation de la torah semble être une impasse.
Il y a une manière de sortir de cette impasse, c’est Moshé, l’intermédiaire.
Dans son livre « la parole intermédiaire », François Flahault, fait une découverte intéressante. Il explique qu’il y a un moyen de court circuiter l’identification à une image.
Par exemple, si un homme doit donner un cours de torah a un groupe, pour être crédible, il doit donner tous son pédigrée, les yeshivot dans lesquelles il est passé, les livre qu’il a écrit etc., il doit s’identifier à une image et le groupe doit l’identifier à une image pour être réceptif à son discours.
Par contre, si j’arrive en disant : « je suis allé visiter l’exposition Chu Teh-Chun a la pinacothèque, je vais vous raconter comment c’était ». Le groupe va être réceptif au discours même si il ne sait pas qui je suis, vu que ce n’est pas un savoir qui est communiqué, mais une expérience. (Qui plus est une expérience que le groupe ne pourra pas vivre, puisque l’exposition est à Paris et que lorsque l’on va à Paris on a autre chose à faire, qu’à aller voir une exposition sur un peintre chinois.)
Lorsqu’un narrateur communique une expérience, il n’a pas besoin de s’identifier à une image ou d’être identifié à une image par le groupe. Car les auditeurs vivent l’expérience à travers lui, le narrateur d’une expérience devient tout pour l’auditeur, et l’auditeur devient tout pour le narrateur. Dans les romans le narrateur n’a pas de visage, le lecteur se projette en lui sans l’identifier
L’image sociale n’existe que dans le monde de la communication d’un savoir abstrait et théorique, lorsque l’on rentre dans le monde de l’expérience vécu par un intermédiaire, l’image de soi est court-circuitée.
Dans le don la torah, les juifs reçoivent la loi par le discours, mais pour que le discours dépasse l’image, il faut qu’ils vivent le don de la torah comme une expérience vécu à travers un intermédiaire.
Lorsque Moshé reçoit la torah, tout le peuple d’Israël se projette en lui. Il porte un masque pour voiler son visage, Moshé est la non-image du narrateur à travers lequel tout le peuple d’Israël vit l’expérience du don de la torah.
(Un parallèle amusant irrésistible pour moi, mais qui va encore en énerver plus d’un) Quand Daft Punk a reçu le grammy award cette année, Pharrell Williams n’a rien trouvé d’autre à dire que « Honestly, I bet France is really proud of these guys right now ». À mon avis Pharrell n’aurait pas identifié Daft Punk à la France s’ils ne portaient pas de masque)
Le rav est celui qui arrive à communiquer le message de la torah comme une expérience spirituelle vécue et pas uniquement comme un savoir à acquérir.
Le rav Haim Schmulevits explique que de nos jours une communauté peut prendre la place du rav. Une communauté religieuse peut court-circuiter le rapport à l’image si elle arrive à faire vivre à ses membres une expérience religieuse collective authentique.
Pour qu’un engagement moral ne devienne pas une identification, il faut qu’il soit vécu comme une expérience à travers un tiers. Une expérience mystique directe avec D n’est pas un dépassement de l’image. L’image de soi est avant tout une image social, pour que l’identification a une image soit dépassée, il faut qu’elle le soit socialement, et c’est à travers la projection dans l’expérience de l’autre que ce dépassement a lieu, elle ne peut pas être dépassée par un rapport directe avec D.
Pour qu’une expérience religieuse monothéiste ait un sens social, il faut qu’elle soit vécue à travers un media commun qui dépasse le langage du savoir théorique. Ce media c’était Moshé, par la suite cela sera le temple, aujourd’hui se sont les prières communautaires ou les maisons d’études.
De ce fait, la présence de Moshé était primordiale lors du don de la torah. Il est tout à fait normal que lorsque Moshé s’absente le peuple soit perdu et qu’il en vienne à pratiquer le culte des idoles. À travers l’idole le peuple cherche revivre l’expérience collective de la projection en Moshé.
S’il faut vivre une expérience religieuse médiatisée, le peuple préfère figer l’image de Moshé dans une statue pour ne pas figer D dans une image mentale rigide.
Le veau d’or est, en quelque sorte, la seule manière d’éviter la véritable idolâtrie après le don de la torah et le départ de Moshé.
5- L'explication des prières de Moshé.
C’est pour cette raison que le peuple n’a pas besoin de faire techouvah sur la faute du veau d’or. Car la faute du veau d’or montrait que le peuple avait été entier et complet dans son engagement sur le mont Sinaï. L’engagement entrainait de manière mécanique la faute si Moshé était absent.
C’est pour cette raison que Moshé commence sa première prière en disant « pourquoi D es-tu énervé contre ton peuple ? » cette prière de Moshé répond à la menace de D qui remettait en doute l’élection d’Israël. Selon le midrash, D ne voulait pas donner les tables de la loi à Moshé et Moshé a du prendre les tables de force.
D remettait en cause le pacte qui avait été contracté sur le mont Sinaï. Moshé explique à D que l’engagement d’Israël au Sinaï était sincère et que de ce fait, D aussi est obligé de respecter son engagement quoi qu’il arrive. Or, D avait promis qu’Israël serait le peuple élu pour l’éternité.
D accepté cette première prière de Moshé et il décide de ne pas remettre en cause son engagement avec Israël.
Cependant dans la deuxième prière Moshé cherche à effacer la faute de l’idolâtrie, « per se », qui demeure une faute, même si elle était naturellement prévisible et explicable.
Dans cette prière, moise dit à D que s’il n’efface pas la faute, alors il veut être effacé du livre de la torah. Moshe explique que c’est son absence qui a causé la faute du veau d’or. Si D avait voulu éviter cette faute, il aurait du donner la torah aux juifs sans passer par un intermédiaire.
Si la torah n’avait pas été donnée par un media, elle serait restée un engagement moral rationnel, et il n’aurait pas nécessité le fait de vivre une expérience religieuse commune à travers un media pour dépasser l’identification à une image. La torah serait restée un discours moral et philosophique.
A partir du moment où D a voulu dépasser le langage et la rationalité du discours des images, il doit accepter l’erreur idolâtre, et la nécessité d’une l’expérience médiatisée transcendante. Car seule cette expérience peut dépasser l’identification à une image.
Comme nous l’avons dit plus haut, cette nécessité est absolue si on ne veut pas que D soit défini comme une image immuable. D répond que la faute est pardonnée tant que les juifs continuent à avoir la foi en un D unique qui dépasse l’image.
Mais, si ils fautent à nouveau et qu’ils abandonnent le service de D, la faute du veau d’or n’est plus justifiable et elle devient rétroactivement un acte idolâtre pure. L’expérience spirituelle collective n’est pas un objet de consommation comme un autre, ce n’est pas une nourriture, elle ne peut se justifier que comme une auxiliaire à l’engagement moral envers D et sa loi.
6- Le prophète Elie une antithèse de Moshé et Aharon
La dernière question que je vais demander concerne la haftarah. Elle est tirée d’un passage du premier livre des rois (chapitre 18). Dans ce passage le prophète Élie cherche à convaincre les juifs d’abandonner le culte du baal.
La haftarah dit « Elie s'avança devant tout le peuple, et s'écria: "Jusqu'à quand clocherez-vous entre les deux partis? Si l'Eternel est le vrai Dieu, suivez-le; si c'est Baal, suivez Baal!" Mais le peuple ne lui répondit mot. 22 Et Elle dit au peuple: "Je suis resté, moi, seul prophète de l'Eternel, tandis que les prophètes de Baal sont quatre cent cinquante. 23 Qu'on nous donne deux taureaux: ils en choisiront un pour eux, le dépèceront, l'arrangeront sur le bois, mais sans y mettre le feu; moi, je préparerai l'autre et le placerai sur le bois, sans y mettre le feu. 24 Alors vous invoquerez votre dieu, et moi j'invoquerai l'Eternel; le dieu qui répondra en envoyant la flamme, celui-là sera le vrai Dieu." Tout le peuple s'écria: "C'est bien dit." 25 Alors Elie dit aux prophètes de Baal: "Choisissez l'un des taureaux et opérez les premiers, car vous êtes les plus nombreux; puis invoquez votre divinité, mais ne mettez point de feu." 26 Ils prirent le taureau qu'il leur avait laissé choisir, l'accommodèrent, invoquèrent Baal depuis le matin jusqu'à midi, en disant: "O Baal, exauce-nous!" Mais point de voix, point de réponse, et ils se démenaient toujours autour de l'autel qu'on avait dressé. 27 Sur le midi, Elie les railla, disant: "Criez plus fort, puisque c'est un dieu, quelque affaire l'occupe, une expédition, un voyage... Peut-être dort-il, il s'éveillera." 28 Ils appelèrent à grands cris, se tailladèrent, selon leur coutume, à coups d'épées et de lances, au point que le sang ruisselait sur eux. 29 L'heure de midi écoulée, leurs transports continuèrent jusqu'au moment de l'oblation; mais nul écho, nulle réponse, pas un signe. 30 Elie dit alors à tout le peuple: "Approchez-vous de moi," et tout le peuple s'approcha de lui. Et Elie rétablit l'autel renversé de l'Eternel. 31 Il prit à cet effet douze pierres, selon le nombre des tribus des enfants de Jacob, à qui la voix de l'Eternel avait dit: "Israël sera ton nom." 32 Et il érigea avec ces pierres un autel dédié à l'Eternel, et il pratiqua tout autour une tranchée, de la contenance de deux mesures de grains. 33 Puis il disposa le bois, dépeça le taureau, le plaça sur le bois, 34 et dit: "Emplissez d'eau quatre cruches et la répandez sur la victime et sur le bois!" Il ajouta: "Encore!" et l'on obéit; "une troisième fois!" et l'on obéit. 35 L'eau ruisselait autour de l'autel, et la tranchée même, on l'avait remplie d'eau. 36 A l'heure de l'oblation, le prophète Elie s'avança en disant: "Eternel! Dieu d'Abraham, d'Isaac et d'Israël! Qu'il devienne manifeste aujourd'hui que tu es la Divinité d'Israël, que je suis ton serviteur, et que c'est par ton ordre que j'ai fait toutes ces choses. 37 Exauce-moi, Seigneur, exauce-moi, afin que ce peuple reconnaisse que c'est toi le vrai Dieu; et tu auras ainsi amené leur cœur à résipiscence." 38 Le feu de l'Eternel jaillit alors, consuma la victime, le bois, les pierres, la terre, et absorba l'eau de la tranchée. 39 Tout le peuple, à cette vue, tomba sur sa face et s'écria: "L'Eternel est le vrai Dieu! L'Eternel est le vrai Dieu!" 40 Elie leur dit "Saisissez-vous des prophètes de Baal et que pas un n'échappe!" On les saisit, Elie les fit descendre vers la vallée de Kishon et les y égorgea. » .
Dans ce passage Élie fait un miracle et les juifs font techouvah, contrairement à Aharon qui n’a pas la force de s’opposer au peuple, Élie arrive à manipuler la foule et à faire égorger les 400 prophètes qui sont contre lui. On s’attendrait donc a ce que le peuple soit pardonné et béni de D.
Or, c’est le contraire qui se passe. Après ce passage Élie retourne sur le mont Sinaï et il demande à D d’anéantir le peuple d’Israël par ce qu’ils ont fauté. D répond à sa prière et il lui promet d’anéantir le peuple et de laisser uniquement 7000 personne en vie, les versets disent en effet « une voix lui arriva qui disait: "Que fais-tu là, Elie?" 14 Il répondit: "J'ai fait éclater mon zèle pour toi, Seigneur, Dieu-Cebaot, parce que les enfants d'Israël ont répudié ton alliance, renversé tes autels et fait périr tes prophètes par le glaive; moi seul je suis resté, et ils cherchent aussi à m'enlever la vie." 15 Le Seigneur lui dit: "Va, reprends ta route vers le désert de Damas. Arrivé là, tu sacreras Hazael comme roi de Syrie; 16 puis, Jéhu, fils de Nimchi, tu le sacreras roi d'Israël, et Élisée, fils de Chafat, d'Abel-Mehôla, tu l'oindras comme prophète pour te succéder. 17 Or, celui qui aura échappé au glaive d'Hazael, Jéhu le fera mourir; et qui aura échappé au glaive de Jéhu, Élisée le fera mourir. 18 Mais j'en épargnerai sept mille en Israël: à savoir, tous ceux dont le genou n'a point fléchi devant Baal, et dont la bouche ne lui a point adressé d'hommages. »
Il se trouve donc qu’a l’époque d’Élie l’enfant d’Israël on fait techouvah, et que malgré tout ils sont massacrés, par ce que le prophète de l’époque, Élie fait une prière pour qu’ils se fassent décimer, alors que dans le désert les enfants d’Israël ne font pas techouvah, mais ils sont sauvés par ce que le prophète de l’époque décide de prier pour eux. Comment comprendre la logique de ces passages ? Comment comprendre la réaction d’Élie ?
La réponse à cette question est la suivante, les juifs de l’époque d’Elie ont vécu une expérience transcendante collective par l’intermédiaire du prophète. Mais malgré tout, ils ne s’engagent pas moralement à abandonner complètement le culte du baal. Lorsque la reine Jézabel veut tuer Elie, le peuple ne se révolte pas contre elle. Pour les juifs de cette époque, l’expérience religieuse est un bien consommable, on amène un sacrifice comme on va écouter un concert de musique andalouse avant d’aller en boite. Pour des juifs comme ca, il n’y a pas d’espoir.
Les documents
Rashi 32-32
Et maintenant, si tu supportes leur péché Ce sera bien. Je ne te dirai pas : « Efface-moi ! »
Et sinon efface-moi Le texte s’exprime ici, comme c’est souvent le cas, de manière elliptique.
De ton livre De la Tora tout entière, afin que l’on ne dise pas de moi que je n’ai pas été capable de solliciter pour eux la miséricorde divine (Berakhoth 32a).
Rashi 32-7
S’est corrompu ton peuple Il n’est pas écrit : « S’est corrompu le peuple », mais : « “ton” peuple ». Il s’agit du « ramassis » que tu as accueilli de ta propre initiative et que tu as converti sans me consulter, en disant : « Il est bon que des convertis s’attachent à la chekhina ! » Ce sont ces gens-là qui se sont corrompus et ont corrompu les autres !
Exode 19
Le peuple entier répondit d'une voix unanime: "Tout ce qu'a dit l'Éternel, nous le ferons!" Et Moïse rapporta les paroles du peuple au Seigneur. 9 L'Éternel dit à Moïse: "Voici, moi-même je t'apparaîtrai au plus épais du nuage, afin que le peuple entende que c'est moi qui te parle et qu'en toi aussi ils aient foi constamment." Alors Moïse redit à l'Éternel les paroles du peuple.
mauss
Il n'y a pas lieu d'expliquer longuement pourquoi le profane entre ainsi en relations avec le divin ; c'est qu'il y voit la source même de la vie. Il a donc tout intérêt à s'en rapprocher puisque c'est là que se trouvent les conditions mêmes de son existence. Mais d'où vient qu'il ne s'en rapproche qu'en en restant à distance ? D'où vient qu'il ne communique avec le sacré qu'à travers un intermédiaire ? Les effets destructifs du rite expliquent en partie cet étrange procédé. Si les forces religieuses sont le principe même des forces vitales, en elles-mêmes, elles sont de telle nature que le contact en est redoutable au vulgaire. Surtout quand elles atteignent un certain degré d'intensité, elles ne peuvent se concentrer dans un objet profane sans le détruire. Le sacrifiant, quelque besoin qu'il en ait, ne peut donc les aborder qu'avec la plus extrême prudence. Voilà pourquoi, entre elles et lui, il insère des intermédiaires dont le principal est la victime. S'il s'engageait jusqu'au bout dans le rite, il y trouverait la mort et non la vie. La victime le remplace. Elle seule pénètre dans la sphère dangereuse du sacrifice, elle y succombe, et elle est là pour y succomber. Le sacrifiant reste à l'abri ; les dieux la prennent au lieu de le prendre. Elle le rachète. Moïse n'avait pas circoncis son fils : Iahwe vint « lutter » avec lui dans une hôtellerie. Moïse se mourait lorsque sa femme coupa violemment le prépuce de l'enfant et le jeta aux pieds de lahwe en lui disant : « Tu m'es un époux de sang. » La destruction du prépuce a satisfait le dieu qui ne détruit plus Moïse racheté. Il n'y a pas de sacrifice où n'intervienne quelque idée de rachat.
Mais cette première explication n'est pas assez générale ; car, dans le cas de l'offrande, la communication se fait également par un intermédiaire, et pourtant il n'y a pas destruction. C'est qu'une consécration trop forte a de graves inconvénients, alors même qu'elle n'est pas destructive. Tout ce qui est trop profondément engage dans le domaine religieux est, par cela même, retire du domaine profane. Plus un être est empreint de religiosité, plus il est chargé d'interdits qui l'isolent. La sainteté du Nazir le paralyse. D'un autre côté, tout ce qui entre en contact trop intime avec les choses sacrées prend leur nature et devient sacré comme elles. Or le sacrifice est fait par des profanes. L'action qu'il exerce sur les gens et sur les choses est destinée à les mettre en état de remplir leur rôle dans la vie temporelle. Les uns et les autres ne peuvent donc entrer utilement dans le sacrifice qu'à condition de pouvoir en sortir. Les rites de sortie servent en partie à ce but. Ils atténuent la consécration ; mais, à eux seuls, ils ne pourraient l'atténuer assez si elle avait été trop intense. Il importe donc que le sacrifiant ou l'objet du sacrifice ne la reçoivent qu'amortie, c'est-à-dire d'une manière indirecte. C'est à quoi sert l'intermédiaire. Grâce à lui, les deux mondes en présence peuvent se pénétrer tout en restant distincts.
Ainsi s'explique un caractère très particulier du sacrifice religieux. Dans tout sacrifice, il y a un acte d'abnégation, puisque le sacrifiant se prive et donne. Même cette abnégation lui est souvent imposée comme un devoir. Car le sacrifice n'est pas toujours facultatif ; les dieux l'exigent. On leur doit le culte, le service, comme dit le rituel hébreu ; on leur doit leur part, comme disent les Hindous. - Mais cette abnégation et cette soumission ne sont pas sans un retour égoïste. Si le sacrifiant donne quelque chose de soi, il ne se donne pas ; il se réserve prudemment. C'est que, s'il donne, c'est en partie pour recevoir. - Le sacrifice se présente donc sous un double aspect. C'est un acte utile et c'est une obligation. Le désintéressement s'y mêle à l'intérêt. Voilà pourquoi il a été si souvent conçu sous la forme d'un contrat Au fond, il n'y a peut-être pas de sacrifice qui n'ait quelque chose de contractuel. Les deux parties en présence échangent leurs services et chacune y trouve son compte. Car les dieux, eux aussi, ont besoin des profanes. Si rien n'était réservé de la moisson, le dieu du blé mourrait ; pour que Dionysos puisse renaître, il faut que, aux vendanges, le bouc de Dionysos soit sacrifié ; c'est le soma que les hommes donnent a boire aux dieux qui fait leur force contre les démons. Pour que le sacré subsiste, il faut qu'on lui fasse sa part, et c'est sur la part des profanes que se fait ce prélèvement. Cette ambiguïté est inhérente à la nature même du sacrifice. Elle tient, en effet, à la présence de l'intermédiaire, et nous savons que, sans intermédiaire, il n'y a pas de sacrifice. Parce que la victime est distincte du sacrifiant et du dieu, elle les sépare tout en les unissant ; ils se rapprochent, mais sans se livrer tout entiers l'un à l'autre.
Rois 1, 18 (Français)
1 De longs jours s'écoulèrent. La troisième année, la parole du Seigneur s'adressa à Elie en ces termes: "Va, présente-toi devant Achab, je veux rendre la pluie à cette contrée." 2 Elie partit pour paraître devant Achab; la famine alors était grande à Samarie. 3 Achab manda Obadia, l'intendant du palais. Cet Obadia était un fervent adorateur de l'Eternel. 4 Tandis que Jézabel exterminait les prophètes de l'Eternel, Obadia en avait pris cent, qu'il avait cachés par cinquante dans des cavernes et qu'il avait sustentés de pain et d'eau. 5 Et Achab dit à Obadia: "Parcours le pays pour explorer toutes les sources et tous les torrents, peut-être trouveronsnous de l'herbe pour la nourriture des chevaux et des mulets et ne perdrons-nous pas une partie de nos bêtes." 6 Ils répartirent entre eux la contrée à explorer; Achab se dirigea d'un côté, à part, et Obadia, à part, se dirigea de l'autre. 7 Comme Obadia suivait sa route, il vit venir Elie à sa rencontre; le reconnaissant, il se jeta sur la face et dit: "Est-ce toi, Elie, monseigneur?" 8 Il lui répondit: "C'est moi. Va dire à ton maître: Voici Elie." 9 Obadia repartit: "Quel mal ai-je fait, pour que tu exposes ton serviteur à être mis à mort par Achab? 10 Par l'Eternel, ton Dieu! Il n'est peuple ni royaume où mon maître n'ait envoyé pour te chercher; et quand ils disaient qu'on ne savait rien de toi, il obligeait royaume et peuple à jurer qu'on ne t'avait point trouvé. 11 Et maintenant tu me dis: Va dire à ton maître: Voici Elie! 12 Mais à peine t'aurais-je quitté, que le souffle du Seigneur te portera vers un lieu que j'ignore; j'irai t'annoncer à Achab, et il ne te trouvera pas, et il me tuera! Or, ton serviteur révère l'Eternel depuis son enfance. 13 Mon seigneur n'a-t-il pas appris ce que je fis, lorsque Jézabel mit à mort les prophètes de l'Eternel? J'en cachai une centaine cinquante dans chaque souterrain - et je les nourris de pain et d'eau. 14 Et maintenant tu dis: Va dire à ton maître: Voici Elie! Mais il me tuera!" 15 Elie répondit: "Par l'Eternel-Cebaot, dont je suis le serviteur! Aujourd'hui même je paraîtrai à sa vue." 16 Obadia alla rejoindre Achab, qu'il mit au courant, et Achab alla au-devant d'Elie. 17 En apercevant Elie, Achab lui dit: "Te voilà donc, perturbateur d'Israël?" 18 Il répondit: "Ce n'est pas moi qui ai jeté le trouble en Israël, c'est toi et la maison de ton père, puisque vous avez déserté les lois de l'Eternel, puisque tu as adopté le culte des Baal! 19 Et maintenant, fais rassembler autour de moi tout Israël vers le mont Carmel, avec les quatre cent cinquante prophètes de Baal et les quatre cents prophètes d'Achêra, qui vivent de la table de Jézabel. 20 Achab envoya des ordres parmi tous les enfants d'Israël, et rassembla les prophètes sur le mont Carmel. 21 Elie s'avança devant tout le peuple, et s'écria: "Jusqu'à quand clocherez-vous entre les deux partis? Si l'Eternel est le vrai Dieu, suivez-le; si c'est Baal, suivez Baal!" Mais le peuple ne lui répondit mot. 22 Et Elle dit au peuple: "Je suis resté, moi, seul prophète de l'Eternel, tandis que les prophètes de Baal sont quatre cent cinquante. 23 Qu'on nous donne deux taureaux: ils en choisiront un pour eux, le dépèceront, l'arrangeront sur le bois, mais sans y mettre le feu; moi, je préparerai l'autre et le placerai sur le bois, sans y mettre le feu. 24 Alors vous invoquerez votre dieu, et moi j'invoquerai l'Eternel; le dieu qui répondra en envoyant la flamme, celui-là sera le vrai Dieu." Tout le peuple s'écria: "C'est bien dit." 25 Alors Elie dit aux prophètes de Baal: "Choisissez l'un des taureaux et opérez les premiers, car vous êtes les plus nombreux; puis invoquez votre divinité, mais ne mettez point de feu." 26 Ils prirent le taureau qu'il leur avait laissé choisir, l'accommodèrent, invoquèrent Baal depuis le matin jusqu'à midi, en disant: "O Baal, exauce-nous!" Mais point de voix, point de réponse, et ils se démenaient toujours autour de l'autel qu'on avait dressé. 27 Sur le midi, Elie les railla, disant: "Criez plus fort, puisque c'est un dieu, quelque affaire l'occupe, une expédition, un voyage… Peut-être dort-il, il s'éveillera." 28 Ils appelèrent à grands cris, se tailladèrent, selon leur coutume, à coups d'épées et de lances, au point que le sang ruisselait sur eux. 29 L'heure de midi écoulée, leurs transports continuèrent jusqu'au moment de l'oblation; mais nul écho, nulle réponse, pas un signe. 30 Elie dit alors à tout le peuple: "Approchez-vous de moi," et tout le peuple s'approcha de lui. Et Elie rétablit l'autel renversé de l'Eternel. 31 Il prit à cet effet douze pierres, selon le nombre des tribus des enfants de Jacob, à qui la voix de l'Eternel avait dit: "Israël sera ton nom." 32 Et il érigea avec ces pierres un autel dédié à l'Eternel, et il pratiqua tout autour une tranchée, de la contenance de deux mesures de grains. 33 Puis il disposa le bois, dépeça le taureau, le plaça sur le bois, 34 et dit: "Emplissez d'eau quatre cruches et la répandez sur!a victime et sur le bois!" Il ajouta: "Encore!" et l'on obéit; "une troisième fois!" et l'on obéit. 35 L'eau ruisselait autour de l'autel, et la tranchée même, on l'avait remplie d'eau. 36 A l'heure de l'oblation, le prophète Elie s'avança en disant: "Eternel! Dieu d'Abraham, d'Isaac et d'Israël! Qu'il devienne manifeste aujourd'hui que tu es la Divinité d'Israël, que je suis ton serviteur, et que c'est par ton ordre que j'ai fait toutes ces choses. 37 Exauce-moi, Seigneur, exauce-moi, afin que ce peuple reconnaisse que c'est toi le vrai Dieu; et tu auras ainsi amené leur coeur à résipiscence." 38 Le feu de l'Eternel jaillit alors, consuma la victime, le bois, les pierres, la terre, et absorba l'eau de la tranchée. 39 Tout le peuple, à cette vue, tomba sur sa face et s'écria: "L'Eternel est le vrai Dieu! L'Eternel est le vrai Dieu!" 40 Elie leur dit "Saisissez-vous des prophètes de Baal et que pas un n'échappe!" On les saisit, Elie les fit descendre vers la vallée de Kichôn et les y égorgea. 41 Puis, Elie dit à Achab: "Va, mange et bois, car déjà j'entends le grondement d'une abondante pluie." 42 Achab se retira pour manger et boire, tandis qu'Elie montait au sommet du Carmel, où il se penchait vers la terre et mettait son visage entre ses genoux. 43 Et il dit à son serviteur: "Monte et regarde dans la direction de la mer." Il monta, regarda, et dit: "Je ne vois rien." Elie dit jusqu'à sept fois: "Recommence!" 44 La septième fois, le serviteur dit: "Je vois venir, du côté de la mer, un nuage aussi petit qu'une main d'homme." Et Elie répondit "Va dire à Achab: Fais atteler et redescends, de peur que la pluie ne t'arrête." 45 Cependant, peu à peu, le ciel s'était couvert de nuages, il ventait, et une grosse pluie tomba. Achab monta sur son char et s'en alla à Jezreël. 46 Poussé par la main de Dieu, Elie ceignit ses reins et courut en avant d'Achab jusqu'à l'entrée de Jezreël.
Exode, 32 (Français)
1 Le peuple, voyant que Moïse tardait à descendre de la montagne, s'attroupa autour d'Aaron et lui dit: "Allons! fais-nous un dieu qui marche à notre tête, puisque celui-ci, Moïse, l'homme qui nous a fait sortir du pays d'Égypte, nous ne savons ce qu'il est devenu." 2 Aaron leur répondit: "Détachez les pendants d'or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles et me les apportez." 3 Tous se dépouillèrent des pendants d'or qui étaient à leurs oreilles et les apportèrent à Aaron. 4 Ayant reçu cet or de leurs mains, il le jeta en moule et en fit un veau de métal; et ils dirent: "Voilà tes dieux, ô Israël, qui t'ont fait sortir du pays d'Égypte!" 5 Ce que voyant, Aaron érigea devant lui un autel et il proclama: "A demain une solennité pour l'Éternel!" 6 Ils s'empressèrent, dès le lendemain, d'offrir des holocaustes, d'amener des victimes rémunératoires; le peuple se mit à manger et à boire, puis se livra à des réjouissances. 7 Alors l'Éternel dit à Moïse: "Va, descends! car on a perverti ton peuple que tu as tiré du pays d'Égypte! 8 De bonne heure infidèles à la voie que je leur avais prescrite, ils se sont fait un veau de métal et ils se sont courbés devant lui, ils lui ont sacrifié, ils ont dit: ‘Voilà tes dieux, Israël, qui t'ont fait sortir du pays d'Égypte!’" 9 L'Éternel dit à Moïse: "Je vois que ce peuple est un peuple rétif. 10 Donc, cesse de me solliciter, laisse s'allumer contre eux ma colère et que je les anéantisse, tandis que je ferai de toi un grand peuple!" 11 Mais Moïse implora l'Éternel son Dieu, en disant:"Pourquoi, Seigneur, ton courroux menace-t-il ton peuple, que tu as tiré du pays d'Égypte avec une si grande force et d'une main si puissante? 12 Faut-il que les Égyptiens disent: ‘C'est pour leur malheur qu'il les a emmenés, pour les faire périr dans les montagnes et les anéantir de dessus la face de la terre!’ Reviens de ton irritation et révoque la calamité qui menace ton peuple. 13 Souvienstoi d'Abraham, d'Isaac et d'Israël, tes serviteurs, à qui tu as juré par toi-même leur disant: Je ferai votre postérité aussi nombreuse que les étoiles du ciel; et tout ce pays que j'ai désigné, je le donnerai à votre postérité, qui le possédera pour jamais!" 14 L'Éternel révoqua le malheur qu'il avait voulu, infliger à son peuple. 15 Moïse redescendit de la montagne, les deux tables du Statut à la main, tables écrites sur leurs deux faces, d'un côté et de l'autre. 16 Et ces tables étaient l'ouvrage de Dieu; et ces caractères, gravés sur les tables, étaient des caractères divins. 17 Josué, entendant la clameur jubilante du peuple, dit à Moïse: "Des cris de guerre au camp!" 18 Moïse répondit: "Ce n'est point le bruit d'un chant de victoire, ce n'est point le cri annonçant une défaite; c'est une clameur affligeante que j'entends!" 19 Or, comme il approchait du camp, il aperçut le veau et les danses. Le courroux de Moïse s'alluma; il jeta de ses mains les tables et les brisa au pied de la montagne. 20 Puis il prit le veau qu'on avait fabriqué, le calcina par le feu, le réduisit en menue poussière qu'il répandit sur l'eau et qu'il fit boire aux enfants d'Israël. 21 Moïse dit à Aaron: "Que t'avait fait ce peuple, pour que tu l'aies induit à une telle prévarication?" 22 Aaron répondit: "Que mon seigneur ne se courrouce point; toi-même tu sais combien ce peuple est prompt au mal. 23 Ils m'ont dit: ‘Fabrique-nous un dieu qui marche à notre tête, puisque celui-ci, Moïse, l'homme qui nous a fait sortir du pays d'Égypte, nous ne savons ce qu'il est devenu.’ 24 Je leur ai répondu: ‘Qui a de l'or?’ et ils s'en sont dépouillés et me l'ont livré; je l'ai jeté au feu et ce veau en est sorti." 25 Moïse vit que le peuple était livré au désordre; qu'Aaron l'y avait abandonné, le dégradant ainsi devant ses ennemis 26 et Moïse se posta à la porte du camp et il dit: "Qui aime l'Éternel me suive!" Et tous les Lévites se groupèrent autour de lui. 27 Il leur dit: "Ainsi a parlé l'Éternel, Dieu d'Israël: ‘Que chacun de vous s'arme de son glaive! passez, repassez d'une porte à l'autre dans le camp et immolez, au besoin, chacun son frère, son ami, son parent!’ 28 Les enfants de Lévi se conformèrent à l'ordre de Moïse; et il périt dans le peuple, ce jourlà, environ trois mille hommes. 29 Moïse dit: "Consacrez-vous dès aujourd'hui à l'Éternel, parce que chacun l'a vengé sur son fils, sur son frère et que ce jour vous a mérité sa bénédiction." 30 Puis le lendemain, Moïse dit au peuple: "Pour vous, vous avez commis un grand péché! Et maintenant, je vais monter vers le Seigneur, peut-être obtiendrai-je grâce pour votre péché." 31 Moïse retourna vers le Seigneur et dit: "Hélas! Ce peuple est coupable d'un grand péché, ils se sont fait un dieu d'or; 32 et pourtant, si tu voulais pardonner à leur faute!... Sinon efface-moi du livre que tu as écrit." 33 Le Seigneur répondit à Moïse: "Celui qui a prévariqué envers moi, c'est lui que j'effacerai de mon livre. 34 Et maintenant va, conduis ce peuple où je t'ai dit; mon envoyé te précédera. Mais le jour où j'aurai à sévir, je leur demanderai compte de ce péché." 35 Ainsi l'Éternel châtia le peuple, comme auteur du veau qu'avait fabriqué Aaron.
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